13 novembre 2024
Zone d’apprentissage optimale
Trouvez la recette parfaite qui vous permet de plonger dans une tâche au point d’en oublier tout ce qui vous entoure…
3 ingrédients dans l’expérience d’apprentissage optimale
Imaginez une personne plongée dans une tâche d’apprentissage. Au départ, il y a des hésitations, des essais et des erreurs. Mais tranquillement le monde extérieur s’efface et ses connaissances s’alignent naturellement pour résoudre, créer et compléter le défi qui est lancé. La personne est complètement absorbée. Cet état de grâce s’appelle, selon Mihály Csíkszentmihályi, le « flow ». C’est l’expérience optimale de l’apprentissage.
Recette magique
Cet état de grâce, souvent témoigné chez des musicien.nes et des athlètes, recèle des éléments clés pour concevoir et calibrer des formations véritablement engageantes. En décortiquant ces expériences, Csíkszentmihályi démontre que la zone d’apprentissage optimale se trouve à l’intersection parfaite entre un défi suffisamment exigeant et les compétences de l’individu pour le relever. Un défi trop facile, on s’ennuie, un défi trop difficile, on se décourage. Bon, c’est assez évident dit comme ça, mais en creusant les nuances, on découvre plusieurs concepts qui peuvent intensifier la pertinence et la clarté de la formation.
1 : Connaître l’individu qui suivra la formation e-learning
Imaginez quelqu’un qui prépare une session pour des gestionnaires novices. Plutôt que débuter la formation en ligne avec les théories de base, on pose la question : « pensez à quelqu’un qui vous a vraiment inspiré ». Pour créer une expérience optimale, il faut rencontrer l’individu là où il se trouve, en utilisant ce qui est déjà dans son esprit comme fondation. Peu importe le sujet ou la complexité du matériel, tisser une connexion avec la personne qui suit la formation en ligne alimente un sentiment d’assurance.
2 : Calibrer les défis
Deuxième élément crucial pour maintenir la motivation de l’individu qui suit la formation : créer des défis réalisables. Plus facile à dire qu’à faire, bien entendu. Prenons l’enfant qui veut réaliser un château en Lego : Donner les instructions et vider la boîte sur le plancher risque d’être décourageant. En revanche, demander d’assembler une porte, une tour, un toit, l’enfant risque de gagner en confiance et en compétence à chaque succès. De même, en comprenant bien votre public et en identifiant les besoins dans le monde réel, vous pourrez structurer une progression naturelle d’exercices qui mènent vers l’objectif final. Chaque étape est un défi en soi, assurant ainsi un engagement constant et un sentiment de progrès continu.
3 : Fournir des rétroactions
Une portion importante du livre Csíkszentmihályi est consacré à ce point. À un tel point que l’on pourrait se demander si la rétroaction ne joue pas un rôle plus important que le contenu lui-même. Il donne l’exemple des prisonniers de la Seconde Guerre mondiale qui, pour se stimuler mentalement et émotionnellement, mémorisaient et transmettaient, des poèmes. Ici, la rétroaction est subtile et profondément humaine : en récitant les poèmes, ils entendent une validation de leurs efforts et l’écoute active de l’autre prisonnier renforce un sentiment de compétence et de connexion. En ajoutant des strophes, ils vivent un sentiment de progrès, et ce dans des conditions d’isolement, de manque de nourriture, de violences et d’une absence totale de liberté. Comme de quoi cette rétroaction nourrit l’esprit. Bref, nos épisodes d’apprentissage doivent fournir une forme de confirmation de la performance quasi immédiate afin de provoquer une motivation pour continuer.
Difficulté adaptative
Aujourd’hui, loin de cette époque, la notion d’apprentissage (ou défi) optimale est au cœur de l’industrie du jeu vidéo. Cette notion a sans doute influencé, directement ou indirectement, le développement de la « difficulté adaptative » générée par l’intelligence artificielle (IA). Par exemple, dans les jeux Resident Evil 4 et Mario Kart, le niveau de difficulté va s’adapter en temps réel en fonction des actions des participant.es. Ainsi, compétences des joueurs et des joueuses, calibrage du défi et rétroaction se font en quelques millisecondes. Encore un exemple où IA devient un allié à l’apprentissage.
Tout comme le ou la gestionnaire novice qui ressent que ses connaissances antérieures sont valorisées, l’enfant qui construit son château en Lego pas à pas et le prisonnier de guerre qui s’accroche à la stimulation intellectuelle pour survivre, l’expérience « flow » et l’harmonie dans l’apprentissage sont extrêmement puissantes. Prendre conscience des dynamiques qui sous-tendent cet état peut nous guider vers la création d’expériences d’apprentissage plus affinées et motivantes. En rassemblant les trois ingrédients principaux – connaître l’individu qui suivra la formation en ligne, calibrer les défis et fournir des rétroactions rapides – vous obtenez la formule pour des expériences d’apprentissage imprégnées de ce que l’on pourrait appeler l’IH, « intelligence humaine ».